Claire Sorelle a grandi entre la région parisienne, la Normandie et le Morbihan.

Les premiers travaux sur La profondeur des bayous datent de 2015. Ce qui l'a inspirée : la richesse historique de la Louisiane, cet étrange territoire né des courants du Mississippi où pullulent les moustiques et les alligators.

En 2017, elle y parcourt plus de mille kilomètres pour parfaire sa documentation. L'occasion d'être reçue par une prêtresse vaudou à La Nouvelle-Orléans, d'arpenter le Vieux Carré en compagnie d'un collectif afro-américain, de discuter avec un chasseur d'alligators octogénaire dans la région de Breaux Bridge. Et de visiter une bonne douzaine de plantations, sans jamais oublier que ces demeures ont été bâties par des personnes réduites en esclavage.

En 2018, elle rencontre Jean-Marie Laclavetine, éditeur chez Gallimard, qui suit son projet pendant plusieurs années. Le comité de la maison finit toutefois par refuser le texte. Tant pis... elle choisit l'autoédition.

Elle réside à Washington DC avec son compagnon et leur petite fille.

Son métier dans la vraie vie : rédactrice et traductrice.

Ses passions : le chocolat, les récits de navigation à la voile, le kayak en eau vive et les couleurs de l'automne.

Sa playlist d'écriture : des cloches tibétaines, en boucle.

Les romans qui l'ont marquée :

  • Les raisins de la colère, de John Steinbeck, pour la richesse de ses recherches et la force de ses images.
  • Vers le phare, de Virginia Woolf, pour la puissance du discours intérieur de Madame Ramsay (et cette maison qui se dégrade lentement pendant la guerre... !)
  • Un barrage contre le Pacifique, de Marguerite Duras... quelle mère.
  • Les vestiges du jour, de Kazuo Ishiguro... une prouesse, ce monologue si juste qu'il tient sur 200 pages.
  • Miss Islande, d'Auður Ava Ólafsdóttir, pour la poésie, pour le féminisme, et les petits moments qui se superposent et forment discrètement une histoire.
  • Les trois lumières, de Claire Keegan, pour la simplicité de son écriture... faire beaucoup avec peu.
  • Cent ans de solitude, de Gabriel García Márquez... évidemment.

Sa démarche

J'ai toujours voulu écrire un roman. J'ai fait tant de tentatives. Un jour, par chance, je suis tombée sur un reportage de magazine qui parlait des bayous louisianais. L'auteur y évoquait les cyprès, les hérons, la mousse espagnole.

Intriguée, j'ai prolongé cette lecture par d'autres articles, puis des essais et des documentaires. J'ai découvert la richesse de l'histoire de la Louisiane, entre nations amérindiennes, colonisation par le royaume de France et cruauté de l'esclavage : tout un pan de notre histoire qui m'avait plus ou moins échappé. J'ai parcouru quelques romans, mais tous m'ont paru datés et souvent racistes. J'ai voulu proposer autre chose.

Il m'a fallu huit ans pour y arriver.

Huit ans pour apprendre à écrire un roman. Huit ans pour esquisser des personnages et les voir prendre vie sous ma main. J'ai produit sept versions de ce texte : la première était très longue, les suivantes plus resserrées – jusqu'au texte final, celui dont j'ai soigneusement pesé chaque mot et chaque image. Celui dont je suis fière.

J'ai accordé une importance énorme à ma documentation. Écrire sur l'esclavage quand on est blanche, c'est difficile : on n'a pas vécu le racisme dans sa chair. J'ai donc tenu à consulter des sources primaires ou secondaires irréprochables… des auteurs et autrices qui ont connu la servitude (Frederick Douglass, Harriet Jacobs, Olaudah Equiano, Ellen et William Craft, Solomon Northup…) ou qui ont produit des essais ou des romans reconnus comme fiables.

Ça a été dur. Je n'ai jamais envisagé d'abandonner, mais j'ai souvent pleuré en me rendant compte que mon histoire ne tenait pas debout, que les trente pages récemment écrites ne servaient à rien, ou que je n'étais simplement pas à la hauteur de mon sujet.

Ça a pourtant été merveilleux. Toutes ces lectures, toutes ces rencontres en Louisiane et ailleurs, ces échanges avec Jean-Marie Laclavetine et Charlotte Milandri (responsable du diagnostic éditorial chez Les Mots) en lesquels j'ai trouvé des guides généreux et passionnants.

Et maintenant, le roman est là. Il est acheté, lu, commenté.

Je suis heureuse d’être allée jusqu’au bout.